À quoi sert le goûter ?

Jusqu’au 16e siècle, on mangeait deux fois par jour : à 9 h et vers 19 h. Seuls les riches pouvaient s’autoriser des fringales plus régulières. Progressivement s’inscrit la culture du goûter, ou plutôt « la collation », comme on l’appelait à la renaissance. Il concernait principalement les adultes, et d’abord les femmes (riches) qui aimaient se réunir autour d’une tasse de thé (puisqu’elles n’avaient rien d’autre à faire), pour se raconter les derniers potins.

Comment est-on passé d’une tasse de thé accompagnée de gâteaux faits maison et avec amours (ou pas), à des Kinder Bueno, pain au chocolat industriel ou autres Petits Princes bourrés d’additifs ? Intéressons-nous d’abord à l’objectif du phénomène. Le goûter a la même fonction que les autres repas : nous donner de l’énergie pour rester efficace dans nos tâches quotidiennes. Aujourd’hui, on prend nos repas respectivement à 8 h, 12 h, 16 h et 20 h (soit tous les 4 h). Nous sommes habitués à ces horaires depuis l’enfance. Le besoin d’énergie est avéré à l’école et au travail, deux modalités qui requièrent de la concentration et un investissement de soi régulier. Mais, pensez-vous qu’il en est de même pour un enfant ?

Les enfants ont-ils besoin de goûter ?

L’idée peut choquer, mais la question mérite d’être posée. Les enfants qui sont réputés pour être naturellement bourrés d’énergie, ont-ils besoin d’une dose d’énergie supplémentaire toutes les 4 h ? Jusqu’à leurs entrées à l’école (la petite section), ils n’ont d’ailleurs pas franchement besoin de se concentrer ou du moins pas au même niveau qui leur sera demandé plus tard. Tous les professionnels s’accordent à dire que le goûter est « nécessaire » ou « essentiel », mais en êtes-vous bien sûr ? Ce sont les mêmes qui nous incitaient tous à déjeuner le matin même si l’on n’a pas faim, avant de se raviser au profit d’un « écoutez votre corps ».

Non seulement nous nourrissons nos enfants plus que de raison, mais nous le faisons mal. On les habitue à des produits hypersucrés et mauvais pour la santé, persuadés qu’ils en ont besoin. Mais ce n’est pas franchement la faute des parents. Ils ont juste intériorisé le message des publicités et des lobbies du sucre qui affichent une image « fun » de ces sucreries. Rappelez-vous le slogan de la marque Kit Kat : « Have a break, have a Kit Kat. » Il résume totalement l’état d’esprit des publicités qui représentent le goûter comme un moment de plaisir où on peut se lâcher et consommer n’importe quoi. Représentez-vous le goûter comme un deuxième petit-déjeuner. Vous mangeriez un Kit Kat au petit-déj’ vous ? Il est beaucoup plus classe de sortir des cookies aux chocolats, plutôt que des biscuits céréales blé complet. Je vous recommande une chose : ne donnez pas de goûter à votre enfant. Écoutez plutôt ses besoins. Il est un peu fatigué vers 17 h ? Questionnez-vous sur ce qu’il a mangé à midi. S’il a faim et vous réclame à manger, donnez-lui quelque chose de consistant qui lui coupera sa faim 1 h ou 2 h le temps d’attendre le vrai repas : un fruit, du pain (complet) avec de la confiture, quelques carreaux de chocolat, ou du fromage.

En réalité, plus l’on grandit et plus l’on a besoin du goûter. Ça remotive pour enchaîner le travail. C’est une pause qui permet de se recentrer sur soi. Là est la vraie raison d’être de la collation, pas un concours de celui qui fera le plus plaisir à son enfant, car en faisant cela, on ne le rend que plus addict au sucre. En résumé, plutôt que d’appliquer des modèles de sociétés, soyez à l’écoute de votre corps et celui de votre enfant. Nourrissez-le lorsqu’il le réclame et non parce que c’est l’heure. L’horloge est initialement un repère, mais pas un Dieu en soi, car nous avons tous des façons différentes de fonctionner, et il appartient à chacun de le découvrir.

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